Et puis à onze heure trente, L. s’est réveillé et à treize heures trente, à la faveur d’une accalmie, nous avons décollé.
Nous avions réservé un logement Airbnb trois jours plus tôt. « Et tu as réussi à avoir de la place ! Comme quoi c’est possible ! » s’est exclamée ma voisine. « Je ne crie pas trop victoire avant de l’avoir vraiment vu », avais-je répondu, prudente. « Les Japonais » sont réputés réserver leurs vacances six, voire douze mois à l’avance, et les adaptes du last minute se retrouvent régulièrement le bec dans l’eau. Jeff, le propriétaire de cette maison en bois, importée du Canada nous a-t’il expliqué, et avec vue sur la mer, avait baissé ses prix. Deux cent trente huit euros pour quatre nuits, avec deux chambres, imbattables au Japon. Nous nous sommes posés la question du loup, que j’ai mis sur le dos de la météo : la prévoyance « des Japonais », sans vacances de toutes les façons à cette période.
Nous sommes repassés non loin d’Hakone (1), n’avons pas vu le Mont Fuji, trop couvert, et plongé sur la baie de Suruga, à Namazu. Puis, nous avons traversé la péninsule par les montagnes et la route 414, jusqu’à Shimoda. Par Atami, et Ito, en prenant la 135, le long de la côte, le trajet s’avère plus long. Et peut-être plus beau. Qu’en sais-je ?
Des montagnes, des forêts à perte de vue, des tunnels, une route limitée à quarante kilomètres à l’heure et la nuit tombante. Et moi, les coudes sur le panneau de bord, l’appareil entre les mains, persuadée que je devais prendre en photo le panneau 414, peut-être aussi mythique que le 66 aux Etats-Unis. Il suffisait de combler mes lacunes culturelles. Je dis : « Quand tu vois que je veux prendre une photo, il faut que tu ralentisses. » Mais les locaux, comme tous les montagnards du monde entier semble-t’il, collent aux fesses. Nous empruntons le pont circulaire de Kawazu-Nanadaru (2) pour rejoindre la vallée : « Ouha ! C’est quoi ce truc ? » Après L. a laissé passer le cortège et j’ai pu prendre la photo.
Google nous fait bifurquer à droite, une route étroite sur laquelle les voitures s’arrêtent quand elles se croisent. Des restes de typhons, des barrières clignotantes rouges dans les virages. Est-ce une farce ? Mais non, la 414 est toujours là. Elle s’élargit plus tard.
Enfin la maison de Jeff éclairée dans la nuit. Soixante-quatre ans, professeur de surf, arrivé au Japon à vingt-cinq années pas soufflées. Originaire de Californie, San Diego. Exceptionnellement la chambre est fermée cette nuit. Des restes de matériel. « Nous viendrons réparer le toit demain, à cause des typhons répétés. Une amie vient faire le ménage de onze heures à quinze heures, tous les jours. Demain la chambre sera disponible. C’est sûr. Le wifi ? Ah non. Les câbles eux aussi ont été endommagés. Certains villages alentour n’ont toujours pas d’électricité. » Nous installons les futons pour les enfants sur la mezzanine. Le loup, c’était ça. Bien compréhensible. « Au revoir. Bon séjour ! »
Quelques courses. Un repas simple. Nous couchons nos filles. Redescendons l’échelle de meunier. Je cherche les interrupteurs pour éteindre quelques lumières. Ils se trouvent près de la salle de bain, des toilettes et de la chambre fermée. « Comment s’éteignent ces spots ? Je n’arrive pas à trouver. » Alors je m’arrête. J’entends respirer. Nos filles déjà ? Non. Quelqu’un dort dans la chambre. Profondément. Il est vingt et une heure trente. Le loup, c’est lui. Nous n’avons pas très bien dormi.
- Voir l’article Des cartes postales
- Pont circulaire de Kawazu-Nanadaru, Wikipédia
je veux connaitre la suite !!!!!!!!!!!! c’est qui le loup ???? Y avait quoi/qui dans cette chambre ?????? tu t’essaies au Stephen King (mon auteur préféré by the way) ? J’exige la suite, STP.
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J’adore !!! J’ai bien ri à ton commentaire !!!
Bon, malheureusement, tu verras au prochain texte. Tu vas être déçue, c’est certain… L’histoire ne se poursuit pas comme Stephen King l’écrirait… Mais il pourrait bien reprendre ce début d’histoire. Il y a de la matière 😉
Grosses bises et excellente continuation !
PS : Jamais lu Stephen King. J’ai toujours eu peur d’avoir peur. Une lacune énorme, c’est un fait.
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J’imagine que c’est Jeff qui ronflait dans la pièce à côté ?… je passe à l’article suivant pour en savoir plus 🙂
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-:)))
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