Prenez les suites de films, ou de livres ! Elles se révèlent souvent moins brillantes, en général. Quoique. Si nous pouvons l’affirmer des Visiteurs, le pouvons-nous d’Indiana Jones ou de Harry Potter ?
Avons-nous le courage de discuter et trouver quelques conditions
favorables ? Ici, nous entamons notre neuvième semaine. Comme des prisonniers en taule, nous comptons le temps et tentons de le tuer. Mais à la différence des détenus, notre date de libération, bien que fixée, reste incertaine. Et sous conditions, il va sans dire.
En vue d’entretenir mon corps entre quatre murs, je me mis au yoga. D’autres se mirent au jogging. Il paraîtrait qu’il est facile, voire amusant, de distinguer le vrai jogger de celui du dimanche. Ce dernier attend le déconfinement avec impatience. De mon côté, j’essayai plusieurs programmes : le yoga pour ou contre, c’est comme « on » l’entend, la « dépression », le « doute de soi »,
« l’anxiété ». Samedi, je me chiffonnai un muscle. Dimanche, je portai le bras droit, celui qui écrit, en écharpe avec la ceinture de karaté de notre fille, et j’admirai la puissance de cette pratique. J’inondai le monde de ma photo dépitée. Il s’avère plus aisé de parler de son bras et de yoga que des pannes d’écriture. Enfin. Il m’autorisa à sombrer en pyjama dans mon lit, la toilette aux oubliettes, le corps assez somnolent pour bousiller toutes tentatives de chasser l’ennui. L’esprit comprend que la vie pourrait devenir plus cruelle et se décide à rebondir.
Ce lundi matin, je souffrais à peine. Je fis nos courses dès l’ouverture du magasin ou pas loin, dans une cohue pire que les week-ends, puisqu’« ils » ont dit d’éviter les week-ends. Je désinfectai les poignées de mon chariot et de mes paniers, bousculée par le personnel qui alimentait les lignes des caddies. Je m’agaçai pour la première fois contre les japonais qui prennent le temps de choisir leurs fruits et légumes. Il demeure bien compris que la règle veut d’attendre son tour à la queue, aux étalages inclus. Je passai un bras aux poissons et aux viandes. Je maugréai contre les vieux, sans pouvoir rien leur reprocher. Il faut bien un souffre-douleur à nos malheurs. Les rayons de farine s’avèrent vides. Ceux des pâtes soba (2) proches de ce sort ou à un prix frôlant l’indignation. Plus de pâtes de blé. Adieu Barilla ! Le papier toilette est revenu. La pâte miso aussi (3). Toujours pas de masques. L’air se voit imprégné d’une fébrilité difficilement contenue. Les caissières travaillent par deux et tentent d’évacuer le flot. Mais après tout, jamais un ravitaillement aux relents un tantinet hystériques de réveillons me revigora avec ce bonheur. Je poussai jusqu’à faire le plein de la voiture.
Et puis, il y a le vent. Il ne cesse de souffler depuis deux jours. Il fait vibrer les volets métalliques contre les fenêtres et saccage le sommeil de ses grondements tourmentés. Il hurle par à-coups et sans prévenir. La maison vibre et craque à son tour. Un tremblement de terre qui monte, vous vous arrêtez aux aguets. Non, une rafale. Parfois il change de stratégie et mugit longuement, prisonnier d’un angle. Ce souffle ne finit pas. Il empêche de sortir. Pas vraiment. Mais écornés, c’est vous qui vous pressez de rentrer. Il rendrait fou.
Je veux que tout « ça » s’arrête, et les effets, pour moi, mes proches, la terre entière, je n’en ai plus cure. Les malades en réanimation, je ne les vois plus, le personnel soignant, je ne l’entends plus. Une fiction, un mensonge, un mauvais rêve. Pourvu que les enfants retournent à l’école, revoient les maîtres et les élèves ! Pourvu qu’ils arrêtent de s’étioler allongés sur leur lit, une main faible soulevant le rideau blafard de la fenêtre !
Je consulte l’application Windy autant qu’à la saison des typhons. A minuit, le vent devrait tomber. Et tout à coup, vous entendez le silence. Il vous surprend. Allez ! Vous pouvez dormir. Nous vivons à la mer. La ville masque les géographies pourtant plaisantes. Demain, je me chargerai des courses.
Nous parlons de température aussi (1). La question du thermomètre sans contact à infrarouge fut soulevée. Un peu de responsabilité, à la fin ! Une analyse technique fut menée, les facteurs qui peuvent influencer la mesure, température ambiante, température instantanée de la peau, gaz interférents – je ne sais pas ce qu’ils fabriquent -, distance cible, sueur sur la peau, outre que les thermomètres eux-mêmes peuvent provoquer une erreur de mesure d’environ plus ou moins deux degrés. L’information donne la conversion en Fahrenheit. Dossier précis et complet.
Cent thermomètres à gallium furent commandés et arrivèrent de Corée du Sud. Ils seront distribués et chaque collaborateur aura à déboutonner ce qui se doit afin de prendre sa température sous le bras. L. se lança dans des explications d’aide soignante et d’étudiant en médecine et recommanda en conclusion que les « westerners » n’ajoute pas le fameux un degré. Le patron de L., japonais, le remercia pour son courage. En échange, il dévoila à L. que son patron – le patron du patron de L. -, français, lui avait appris tout récemment que sa température corporelle était de trente-six degrés. Et puisqu’il était son patron – le patron du patron de L. -, français, il devait le croire. Un pince-sans-rire. Vous voyez comment la France pervertit les innocents jusqu’en Orient.
Un collaborateur voulut trouver le moyen d’annuler l’influence de la température extérieure sur la mesure de l’infrarouge. Après avoir garé sa voiture, il fit l’expérience de se coller une des deux paumes de la main sur le front, depuis la fermeture des portes, sur le parking, puis sur le passage pour piétons, des voitures ahuries le laissèrent traverser, s’excusa-t’il de l’autre main, placée en prière, la tête recourbée ?, dans les escaliers qui mènent à l’esplanade, sur l’esplanade qui surplombe le site face à la mer, jusqu’au hall dernier design des architectes, et la retirer au moment de la prise de la température par l’hôtesse. La mesure s’avéra exacte. Il prouva les conclusions techniques des experts et reconnut que cette marche s’avérait assez drôle. De là à persuader l’ensemble des collègues de se rendre au travail la paume sur le front, quel serait le pas ?
Les thermomètres arrivèrent donc. La procédure fut pondue : les dix minutes d’attente après l’arrivée avant d’exécuter l’affaire, son lieu, étage par étage, et caetera. Bien qu’il reste la question du visiteur extérieur afin de trancher s’il devra prendre sa température avec un thermomètre au gallium, désinfecté, une évidence, sous le bras la chemise déboutonnée, la cravate dénouée, vaut-il mieux retirer la chemise du pantalon dans ces conditions et dévoiler un bout de ventre ?, cela dépend du ventre, il doit mouliner vite, le visiteur, quant à la visiteuse, « on » en parle pas de la visiteuse, bref, ou à infrarouge visé au front par l’hôtesse, bouge pas mon gars ou j’te descends !, je doute qu’il se trouve une nouvelle suite à cette histoire.
- Voir l’article Pour un thermomètre
- Pâte soba : pâte de sarrasin
- Miso : aliment japonais traditionnel qui se présente sous forme de pâte fermentée. Voir Wikipédia.
Fou rire à imaginer le collègue faire son trajet la main sur le front 🤣🤣🤣🤣
Merci
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Merci à toi Stéphanie pour ta présence fidèle sur Kawaii et ta participation !!! Il est si bon de partager le rire et l’humour !
Bonne continuation et à très bientôt 😉
Bises
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Coucou !
Nous aussi prise de température, frontale.
Je ne testerai pas de traverser le parking avec la main sur le front 😂
J’espère que ton bras s’est rapidement remis. Bises
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Coucou Nelly,
Merci pour ces news et pardon pour ma réponse tardive… des news à digérer 😉
Je ne savais pas que la prise de température était généralisée… C’est beau ! Tu sais maintenant qu’elle peut vous emmener loin 🙂 Et attention aux températures élevées cet été !!!
J’espère que cette semaine un peu particulière en France se passe bien pour toi et tes proches.
Bon courage ! Et grosses bises !
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