Bien sûr, il ne serait pas possible de reprendre Kawaii sans souhaiter une belle et heureuse année 2021 à chacune de mes lectrices et à chacun de mes lecteurs.
J’avais l’impression de tourner la dernière page d’un chapitre indigeste et d’attaquer le suivant en escomptant que le gros du boulot se tenait derrière moi. A cette occasion, j’avais souvent écrit à mes proches combien j’aimerais que nous marchions tous vers la lumière, celle de l’après Covid. Nous ne nous sommes sans doute jamais autant rencontrés sur la terre à espérer la même chose au même moment et les vaccins nous autorisent à imaginer une année simplement meilleure.
Pourtant, je me montrais dubitative. S’il n’existait que ce fichu virus, notre monde se porterait pas trop mal à la fin. D’autres sujets à se planter la tête dans un trou d’autruche se révélaient plus préoccupants à mes yeux. Bien qu’ils soient trop longs à bien écrire, il s’avère certain que je désirais surtout ces lumières-là, ce qui me fait dire que j’avais bien tourné la page et que j’y croyais.
Nous attendions l’état d’urgence qui devait être annoncé jeudi ou vendredi.
Je lisais que la France encaissait une nouvelle polémique face à l’apparente lenteur de sa campagne de vaccination (1). Je ne la comprenais pas. Pourquoi tant de récriminations si à Noël on affirmait au gouvernement que
« seuls 40 % des personnes interrogées disaient vouloir « certainement ou probablement » se faire vacciner contre la Covid-19 » (2) ? Je ne connaissais pas, moi, la ligne de départ des pays de l’Union, la compétition d’un coup et la France qui avait fait de Mauricette sa championne en l’acclamant en grande pompe. Cours Mauricette ! Cours !
Le Mainichi (3) dévoilait dans ses pages anglophones qu’un vaccin non approuvé contre la Covid-19, certainement d’origine chinoise, avait été introduit dans la péninsule et administré à des dirigeants d’entreprises parmi les plus célèbres du Japon, à des individus fortunés aussi, et des personnes jugées parmi les meilleurs cerveaux du Premier ministre Yoshihide Suga, liste à l’appui. Mon amie japonaise n’avait pas reçu l’information. Celle-ci ne tournait pas en boucle dans les médias. Aucun parfum de scandale ne semblait agiter le pays.
Je m’amusais des gros titres. Une prétendue élite au Japon se ferait vacciner illégalement, et nous pouvons présager que Suga y passera dans les premiers, comme Biden et Harris, quand le gouvernement français éprouverait des scrupules de passe-droits (4) dans une nation qui pour moitié prévoit que l’autre essuiera les plâtres, et attend respectueusement son tour pour se faire vacciner. Je pouffais presque.
C’est à ce moment précis que je me renseignai sur l’avancée du vaccin au Japon. Le 25 décembre (5), il fallait patienter jusqu’à la fin du mois de février pour voir le démarrage de la campagne de vaccination qui visera d’abord les professionnels de santé. Fin du mois de mars, les personnes de plus de soixante-cinq ans, avril ou plus tard les personnes que j’appelais « à risque ». J’appris alors que le Japon possédait l’un des taux de confiance dans les vaccins les plus bas au monde (6). Je tombai de ma chaise. Je croyais fermement que la France remportait la palme des sceptiques et restait indétrônable. Quant à se figurer les japonais réputés disciplinés sur ce terrain-là. La sécurité du vaccin était en cours d’examination avec les laboratoires pharmaceutiques concernés. Je comprenais à demi-mot la nécessité d’essais cliniques complémentaires impliquant des japonais.
Jeudi soir, les quatre préfectures du Grand Tokyo déclaraient l’état d’urgence : Tokyo, Chiba, Saitama, Kanagawa. Jusqu’au 7 février dans un premier temps. Le Japon dépassait le record des sept mille cas journaliers (7). Nous ne découvrions aucune surprise : demande aux restaurants et bars de fermer à vingt heures et d’arrêter le service d’alcool à dix-neuf heures (8). Télétravailler autant que possible. A l’ensemble des habitants, rester chez soi après vingt heures et ne sortir que pour l’essentiel. Je n’apercevais ni le mot « confinement », ni le mot « couvre-feu ». Pas de fermeture des écoles, des crèches aux universités. Pas de sanctions légales pour les personnes qui choisiraient d’ignorer les recommandations du gouvernement.
Ainsi je demeurais sereine. Nous avions connu ce bonheur de passer de bonnes vacances. Vaccin ou pas dans quelques mois, les enfants retourneraient à l’école comme prévu le 11. Je retrouverais mon temps à partir de lundi et j’avais du pain sur la planche. Mes projets prenaient des contours plus concrets. Ce ralentissement forcé de nos activités m’offrirait en outre de meilleures conditions pour abattre le travail que je voyais devant moi. Je me frottais les mains d’impatience.
Vendredi soir, j’appris que malgré les recommandations du gouvernement de laisser les écoles ouvertes afin d’éviter un impact négatif sur l’apprentissage et le bien-être des élèves, afin aussi de ménager la pression sur les familles et aussi parce que les chiffres indiquent qu’elles représentent une très faible occurrence de contamination, l’établissement de nos filles avait décidé le retour à un apprentissage mixte pour les collégiens et les lycéens : un jour à l’école, un jour à la maison, une semaine A, une semaine B. Les primaires quant à eux maintenaient un temps complet à l’école. Pas un seul instant, je n’avais soupçonné une pareille trouvaille et il y a un article à lire si le lecteur souhaite connaître l’effet que cela me fait les un jour sur deux et les week A et les week B (9).
Je me replongeai dans cette histoire de vaccins et je construisis des tableaux afin de clarifier définitivement le sujet. Pfizer et son BNT162b2 serait prêt pour la fin du mois de février (10). Quant aux autres vaccins, soit mai, soit sans calendrier à ce jour. La presse jette le doute sur la capacité du Japon à vacciner sa population avant les Jeux Olympiques d’été. De toutes les façons, les Japonais n’en veulent plus de ces JO (11). Trop coûteux.
Actuellement, je traite l’école d’incapable, de complaisante, de pétocharde. C’est de bonne guerre. Et je pleure. J’aimerais bien avoir une Mauricette.


- Covid-19 : six questions pour comprendre les lenteurs de la vaccination en France, Le Monde, 04 janvier 2021
- Covid-19 : l’intention de se faire vacciner en forte baisse en France, France Inter, 25 décembre 2020
- Major Japan CEOs getting under-the-table immunization with unapproved Chinese vaccine, The Mainichi, 5 janvier 2021
- Covid-19 : le gouvernement tenté de se faire vacciner ?, Le Parisien, 6 janvier 2021
- Japan’s COVID-19 vaccine plan prioritizes health care workers and older residents, the japantimes, 25 décembre 2020 et
Japan stepping up preparations for vaccinations, NHK World – Japan, 2 janvier 2021 - Japan’s bitter vaccine history creates hurdle in COVID-19 fight, the japanimes, 23 décembre 2020
- Japan’s daily COVID-19 cases surge past 7,000; Tokyo logs record 2,447, the japantimes, 7 janvier 2021
- Raison donnée à la focalisation sur les restaurants et débits de boissons : les experts estiment que la majorité des contaminations non traçables (qui sont actuellement de 60 % à Tokyo) trouvent leur source dans les repas à l’extérieur. Sources : Infos locales au Japon.
- La semaine « B » (1)
- Japanese approval of Moderna’s COVID-19 vaccine unlikely until May, Japan Today, 8 janvier 2021
- Support for Olympics hits new low in Japan: poll, Japan Today, 11 janvier 2021
Mauricette et Brigitte ! Les passionarias du Covid !
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Merci pour Brigitte ! 🙂
Vive Mauricette et Brigitte et tous les autres !
A bientôt
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Bonne année a tous
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Bonne année Stéphanie !
Je dévore le livre que tu m’as envoyé… Ode à la vie et à l’instant présent. Je le prêterai à une amie japonaise francophone car la bibliothèque de l’ambassade est fermée…
Je t’embrasse fort et te souhaite bon courage.
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